

Hyojeong, 69 ans, est hospitalisée et violée par un aide-soignant. Elle en informe Dongin, un libraire, qui vit avec elle et décide de le signaler à la police. Lorsque l’aide-soignant prétend qu’il s’agissait de rapports sexuels consentis, Hyojeong et Dongin sont sous le choc…

« 69-se » (69세), ou « An Old Lady » pour la distribution internationale, est un film dramatique sud-coréen datant de 2020, écrit et réalisé par Lim Seon-ae, qui signe ici son premier long-métrage. Les acteurs principaux sont Ye Soo-jung, qu’on a pu voir dans « MAL-MO-E: The Secret Mission » (2018), Ki Joo-bong, qu’on a pu voir dans « The Spy Gone North » (2017), Kim Joon-kyung, qui fait ici ses premiers pas dans ce long-métrage, Kim Tae-hoon, qu’on a pu voir dans « The Long Way Home » (2015), et Kim Joong-ki, qu’on a pu voir dans « Dark Figure of Crime » (2018). Ce métrage est paru en salles coréennes le 20 aout 2020.
L’histoire proposée par « An Old Lady » nous invite à suivre Hyo-jeong (Ye Soo-jung), une dame de 69 ans que nous rencontrons dès les premières minutes du film dans l’obscurité totale. Sur un écran noir, nous l’entendons discuter poliment avec un infirmier lors de ce qui s’apparente à une séance de physiothérapie. L’homme complimente cette dame, de manière de plus en plus insistante, jusqu’à ce que la sonnerie d’une alarme retentisse. Une scène d’ouverture qui, sans l’expliciter clairement, nous fait comprendre que quelque chose s’est passée. Comme le titre l’indique, Hyo-jeong est vraiment une « dame » dans le sens le plus traditionnel du terme. Elle est polie, réservée et n’aime manifestement pas faire des histoires, elle n’aime clairement pas attirer l’attention sur elle. Comment cette femme de 69 ans, qui a été victime d’un viol dans un hôpital, va réagir à cette situation, est en grande partie la question autour de laquelle ce métrage s’articule…
Hyo-jeong vit avec le poète Dong-in (Ki Joo-bong). Elle entretient avec celui-ci une relation amicale platonique. Ils sont devenus proches alors que Dong-in était sous sa garde lorsqu’elle travaillait comme aide-soignante. Il va la soutenir dans cette terrible épreuve. Lorsque Hyo-jeong décide de signaler l’agression aux autorités compétentes, les policiers ont du mal à croire ses paroles. D’autant plus après que le suspect se soit révélé être un jeune et bel homme qui a affirmé lors de l’interrogatoire que la relation sexuelle était consentie. Les choses se compliquent lorsque la propre mémoire de Hyo-jeong est remise en question, car elle a du mal à se rappeler des détails cruciaux sur sa propre vie en dehors de l’affaire. Cela vient jeter le doute sur la véracité de son récit de viol. Ne serait-elle pas tout simplement au début d’un état de sénilité ?
La maltraitance des personnes âgées est un sujet tabou auquel on accorde rarement la considération et l’action sérieuses alors que de telles horreurs l’exigeraient. Alors la maltraitance sexuelle des personnes âgées est encore plus taboue. Le scénario concocté par Lim Seon-ae, qui endosse ici la double casquette de scénariste et de réalisatrice, est éminemment « casse-gueule », mais la cinéaste sud-coréenne aborde le sujet avec une grâce, une délicatesse, une compassion et une prévenance tellement appuyées qu’elles rendent le film terriblement beau et gracieux. Finalement on ne peut qu’éprouver une forte compassion pour le personnage principal, sans jamais tomber dans le pathos et sans faire de Hyo-jeong une héroïne en quête de vengeance.







Une palette de couleurs froides et atténuées est principalement utilisée tout au long du film, bien que des couleurs plus chaudes remplissent les scènes où Hyo-jeong tente de retrouver son sens de la dignité et de soi en retournant vers son ancien emploi d’aide-soignante. On peut dire qu’il y a un sentiment de tristesse qui se dégage de ce film. Et bien qu’il soit courageux dans son thème et bien exécuté dans sa partie technique, reste un sujet difficile dont la nature taboue découragera probablement le public. Mais c’est précisément ce point qui rend ce film si attachant, un message que nous ne voulons pas entendre. Gardons toujours à l’esprit que nos anciens ont également le droit au respect, quelle que soit la situation…
En conclusion, « An Old Lady » est un drame puissant disposant d’une histoire forte, d’une intrigue douce et d’un développement élégant. Le rythme est très lent, le récit est fluide et la narration est linéaire en dehors de quelques petits flashbacks. La photographie joue avec les couleurs froides et chaudes, la bande musicale est très douce, très atténuée, et le montage nous offre un métrage d’une durée d’environ 100 minutes pleine de bienveillance et de courtoisie malgré la difficulté du thème. La distribution offre de très bonnes prestations pleinement surplombées par la performance de Ye Soo-jung. L’ensemble peut s’avérer repoussant mais est incontestablement révélateur de l’état d’esprit de nos civilisations modernes où l’on préfère détourner le regard face à l’indicible…

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